BERNHEIM Renée

  • Auschwitz

  • Née le 30 juillet 1896 à Héricourt

  • Décédée le 20 décembre 1943 à Auschwitz-Birkenau

Renée naît à Héricourt, petite commune de Haute-Saône le 30 juillet 1896. C’est la deuxième fille du couple formé par (Stanislas) Julien Schwob d’Héricourt, né en 1866 à Lure, et de Jane Eugénie Berr, née en 1870. Le couple s’est marié à Oran. Julien, après avoir été capitaine d’artillerie, Croix de guerre et promu officier de la Légion d’honneur, prend des fonctions dans l’entreprise familiale de textile fondée par Stanislas Schwob en 1859. Après divers rachats, le groupe Schwob poursuit sa diversification et son expansion jusqu’en Normandie ou dans la région lilloise. En 1945, elle sera reprise par Marcel Boussac. Par ailleurs, la famille de Renée est l’une des 200 familles actionnaires de la Banque de France.

Renée grandit donc dans une famille fortunée, de confession juive, qui comptera en tout quatre enfants : son aînée, Madeleine, épouse Zivy (née à Héricourt en 1893), Pierre (né en 1899, ingénieur) qui meurt à 29 ans, et Geneviève épouse Decroix (née à Berck en 1903).

Le 23 février 1920, elle quitte le domicile de ses parents avenue Henri-Martin (Paris 16°) pour épouser Léonce Bernheim, né à Toul le 16 avril 1886, lieutenant de réserve d’artillerie, Croix de guerre. Il appartient à une riche famille qui, à la génération précédente – et sur le même modèle que la famille Shwob, à savoir l’association de trois frères – a constitué une immense fortune dans l’Immobilier et la Banque. En 1940, la société possédera des biens en zone libre comme en zone occupée.

Ingénieur de l’École Centrale, Léonce se dirige pourtant vers le droit. Inscrit au barreau de Paris en 1912 et après son engagement militaire en 1914, il devient avocat à la Cour d’appel de Paris et exerce dans son cabinet Avenue de Malakoff. Attaché à sa région Est, militant SFIO, il sera, conseiller municipal de Reims, maire de Pourcy (Marne) de 1935 à 1941, Conseiller Général de Chatilly (Marne) de 1928 à 1941, démissionné d’office en 1941.

Léonce Bernheim soutient le mouvement sioniste en France, des années 20 jusqu’en 1937. Tous deux actifs au sein de la communauté juive, ils contribuent à la fondation du Centre de documentation juive contemporaine.

Renée, n’exerce pas de profession. Comme son mari et ses cousins par alliance, les Dalsace, elle promeut de nombreux artistes. Les Bernheim possèdent d’ailleurs une importante collection de tableaux qu’ils confient en 1939 aux Musées Nationaux ; abritée au château de Brissac, elle sera pillée comme les autres.

Au moment de la guerre, tandis que Léonce est mobilisé comme officier en affectation spéciale, Renée et ses enfants quittent leur domicile parisien du 82 boulevard Flandrin (Paris 16°) pour se réfugier dans le sud. Ils s’installent aux Angles (Gard), Villa Lou Rigaou, à côté de Villeneuve-lès-Avignon où résident depuis 1939 Julien, l’oncle paternel de Léonce, Julien, et Melina son épouse. Les enfants poursuivent cependant leurs études à Grenoble : l’aîné, Philippe Émile, né à Paris, âgé de 21 ans en 1940, intègre l’Institut d’Électrochimie et d’Électrométallurgie et Antoine, né à Paris, bachelier, est alors âgé de 16 ans.

Renée et Léonce se fixent eux aussi à Grenoble début 1942. Mais, le 8 décembre 1943, les époux Bernheim sont arrêtés par la Gestapo, pour motif racial – et intelligence avec l’ennemi selon certains témoignages -, à l’hôtel Standard, rue du Docteur Mazet à Grenoble. Renée avait rendez-vous avec Léonce qui était suivi. Le 13, ils sont transférés tous deux à Drancy, puis déportés par le convoi 63 le 17 décembre 1943 à destination d’Auschwitz-Birkenau où ils sont gazés à leur arrivée (témoignages de deux médecins du camp : Dr Hirsch et Dr Fajgenbaum). La date de leur décès est fixée au 20 décembre. Renée a alors 47 ans.

Sur l’acte de décès de Renée sont apposées les mentions «Mort en déportation» en 1946 et «Mort pour la France» en 1947. C’est le plus jeune fils, Antoine, en accord avec son frère Philippe alors à Buenos-Aires, qui fait les démarches pour que ce dernier titre soit reconnu pour sa mère, comme il l’a été pour son père. En janvier 1963, le titre de Déporté Politique est attribué à Renée, sa carte porte le n° 21 75 15 648.

Renée et Léonce sont les seuls membres de la famille Bernheim à avoir été déportés. Leurs deux enfants ont échappé aux nazis : Philippe, ingénieur en électro-chimie, a émigré en Argentine. Antoine, élève au lycée Janson-de-Sailly, a rejoint la Résistance à Grenoble. Il a obtenu un doctorat en droit en 1946 puis travaillé dans l’entreprise Bernheim jusqu’en 1951. Il a intégré la Banque Lazard en 1967 et est devenu PDG de la compagnie générale d’assurance italienne Generali (1995-1999, 2002-2010). Il est mort en Suisse en 2012.

Une Fondation porte le nom de leurs parents ; créée en 1979, elle vise à soutenir la création contemporaine et l’apport créatif de la culture juive à la vie de la pensée, du savoir et de l’art en général.

Marie BALTA et Gérard KREBS

Sources

Dossier Caen n°21P 4 24 688.

«Ensemble textile Schwob Frères». Sur POP :  La plateforme ouverte du Patrimoine.

«D’une petite rafle provençale». Nelcya Delanoë. Ed. Seuil 2013, p 112 et suivantes.

Témoignage d’Edmond Fleg, beau-frère de Léonce, transmis par Me Blumel, avocat au barreau de Paris, juin 1946. Consulter sur avocatparis.org

«Léonce Bernheim, avocat, militant socialiste et sioniste». De Michel Dreyfus et Catherine Nicault dans Archives juives, revue d’histoire des juifs de France, n° 47-1, 1er semestre 2014.

«Heurs et malheurs de l’entreprise immobilière Bernheim (1890-1945)». De Michel Dreyfus dans Archives juives, 2ème semestre 2015.

«Léonce Bernheim» sur Wikipedia

Site Gallica-BNF :

Avis de décès de Pierre Schwob d’Héricourt. Le Figaro du 22 mars 1938.

Avis d’office religieux célébré le 13 juin 1946 au temple israélite rue des Victoires à Paris, à la mémoire de L. et R. Bernheim. Le Figaro du 11 juin 1946.

Vous avez un complément d’informations ? N’hésitez pas nous le faire savoir.

BERNHEIM Renée

  • Auschwitz

  • Née le 30 juillet 1896 à Héricourt

  • Décédée le 20 décembre 1943 à Auschwitz-Birkenau

Renée naît à Héricourt, petite commune de Haute-Saône le 30 juillet 1896. C’est la deuxième fille du couple formé par (Stanislas) Julien Schwob d’Héricourt, né en 1866 à Lure, et de Jane Eugénie Berr, née en 1870. Le couple s’est marié à Oran. Julien, après avoir été capitaine d’artillerie, Croix de guerre et promu officier de la Légion d’honneur, prend des fonctions dans l’entreprise familiale de textile fondée par Stanislas Schwob en 1859. Après divers rachats, le groupe Schwob poursuit sa diversification et son expansion jusqu’en Normandie ou dans la région lilloise. En 1945, elle sera reprise par Marcel Boussac. Par ailleurs, la famille de Renée est l’une des 200 familles actionnaires de la Banque de France.

Renée grandit donc dans une famille fortunée, de confession juive, qui comptera en tout quatre enfants : son aînée, Madeleine, épouse Zivy (née à Héricourt en 1893), Pierre (né en 1899, ingénieur) qui meurt à 29 ans, et Geneviève épouse Decroix (née à Berck en 1903).

Le 23 février 1920, elle quitte le domicile de ses parents avenue Henri-Martin (Paris 16°) pour épouser Léonce Bernheim, né à Toul le 16 avril 1886, lieutenant de réserve d’artillerie, Croix de guerre. Il appartient à une riche famille qui, à la génération précédente – et sur le même modèle que la famille Shwob, à savoir l’association de trois frères – a constitué une immense fortune dans l’Immobilier et la Banque. En 1940, la société possédera des biens en zone libre comme en zone occupée.

Ingénieur de l’École Centrale, Léonce se dirige pourtant vers le droit. Inscrit au barreau de Paris en 1912 et après son engagement militaire en 1914, il devient avocat à la Cour d’appel de Paris et exerce dans son cabinet Avenue de Malakoff. Attaché à sa région Est, militant SFIO, il sera, conseiller municipal de Reims, maire de Pourcy (Marne) de 1935 à 1941, Conseiller Général de Chatilly (Marne) de 1928 à 1941, démissionné d’office en 1941.

Léonce Bernheim soutient le mouvement sioniste en France, des années 20 jusqu’en 1937. Tous deux actifs au sein de la communauté juive, ils contribuent à la fondation du Centre de documentation juive contemporaine.

Renée, n’exerce pas de profession. Comme son mari et ses cousins par alliance, les Dalsace, elle promeut de nombreux artistes. Les Bernheim possèdent d’ailleurs une importante collection de tableaux qu’ils confient en 1939 aux Musées Nationaux ; abritée au château de Brissac, elle sera pillée comme les autres.

Au moment de la guerre, tandis que Léonce est mobilisé comme officier en affectation spéciale, Renée et ses enfants quittent leur domicile parisien du 82 boulevard Flandrin (Paris 16°) pour se réfugier dans le sud. Ils s’installent aux Angles (Gard), Villa Lou Rigaou, à côté de Villeneuve-lès-Avignon où résident depuis 1939 Julien, l’oncle paternel de Léonce, Julien, et Melina son épouse. Les enfants poursuivent cependant leurs études à Grenoble : l’aîné, Philippe Émile, né à Paris, âgé de 21 ans en 1940, intègre l’Institut d’Électrochimie et d’Électrométallurgie et Antoine, né à Paris, bachelier, est alors âgé de 16 ans.

Renée et Léonce se fixent eux aussi à Grenoble début 1942. Mais, le 8 décembre 1943, les époux Bernheim sont arrêtés par la Gestapo, pour motif racial – et intelligence avec l’ennemi selon certains témoignages -, à l’hôtel Standard, rue du Docteur Mazet à Grenoble. Renée avait rendez-vous avec Léonce qui était suivi. Le 13, ils sont transférés tous deux à Drancy, puis déportés par le convoi 63 le 17 décembre 1943 à destination d’Auschwitz-Birkenau où ils sont gazés à leur arrivée (témoignages de deux médecins du camp : Dr Hirsch et Dr Fajgenbaum). La date de leur décès est fixée au 20 décembre. Renée a alors 47 ans.

Sur l’acte de décès de Renée sont apposées les mentions «Mort en déportation» en 1946 et «Mort pour la France» en 1947. C’est le plus jeune fils, Antoine, en accord avec son frère Philippe alors à Buenos-Aires, qui fait les démarches pour que ce dernier titre soit reconnu pour sa mère, comme il l’a été pour son père. En janvier 1963, le titre de Déporté Politique est attribué à Renée, sa carte porte le n° 21 75 15 648.

Renée et Léonce sont les seuls membres de la famille Bernheim à avoir été déportés. Leurs deux enfants ont échappé aux nazis : Philippe, ingénieur en électro-chimie, a émigré en Argentine. Antoine, élève au lycée Janson-de-Sailly, a rejoint la Résistance à Grenoble. Il a obtenu un doctorat en droit en 1946 puis travaillé dans l’entreprise Bernheim jusqu’en 1951. Il a intégré la Banque Lazard en 1967 et est devenu PDG de la compagnie générale d’assurance italienne Generali (1995-1999, 2002-2010). Il est mort en Suisse en 2012.

Une Fondation porte le nom de leurs parents ; créée en 1979, elle vise à soutenir la création contemporaine et l’apport créatif de la culture juive à la vie de la pensée, du savoir et de l’art en général.

Marie BALTA et Gérard KREBS

Sources

Dossier Caen n°21P 4 24 688.

«Ensemble textile Schwob Frères». Sur POP :  La plateforme ouverte du Patrimoine.

«D’une petite rafle provençale». Nelcya Delanoë. Ed. Seuil 2013, p 112 et suivantes.

Témoignage d’Edmond Fleg, beau-frère de Léonce, transmis par Me Blumel, avocat au barreau de Paris, juin 1946. Consulter sur avocatparis.org

«Léonce Bernheim, avocat, militant socialiste et sioniste». De Michel Dreyfus et Catherine Nicault dans Archives juives, revue d’histoire des juifs de France, n° 47-1, 1er semestre 2014.

«Heurs et malheurs de l’entreprise immobilière Bernheim (1890-1945)». De Michel Dreyfus dans Archives juives, 2ème semestre 2015.

«Léonce Bernheim» sur Wikipedia

Site Gallica-BNF :

Avis de décès de Pierre Schwob d’Héricourt. Le Figaro du 22 mars 1938.

Avis d’office religieux célébré le 13 juin 1946 au temple israélite rue des Victoires à Paris, à la mémoire de L. et R. Bernheim. Le Figaro du 11 juin 1946.

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