RECHERCHEZ
La plupart des informations personnelles ont été fournies par entretien téléphonique avec ses deux fils, Fernand et Serge Balay.
Albert Henri Balay est né le 24 avril 1911 à Meyrannes (Gard). C’est le fils de Rémi, Henri, Marius Balay et de Marie Louise née Agniel, son épouse.
Il suit l’école primaire à Clet, un hameau de Meyrannes ; il n’a plus ensuite qu’à traverser le pont métallique sur la Cèze pour devenir mineur de fond à Molières sur Cèze.
Un capitaine de gendarmerie, ami de sa famille, lui conseille de devenir gendarme et il s’engage comme gendarme mobile pour 18 mois le 19 janvier 1932 donc à vingt et un ans. Cet engagement est renouvelé de six mois en six mois au deuxième bataillon de l’air (ouvrier). A ce titre il aurait été sur le pont de la Concorde à Paris le 6 février 1934 lors de l’émeute antiparlementaire. Il est élevé garde à pied à la 7ème légion GRL le 3 mars 1936 puis garde mobile au 11ème GRM.
Le 12 février 1936, il épouse à Boucoiran (Gard) Elisa Bettinelli. Née à Poscante en Italie, elle est la fille d’Ambrogio Bettinelli, ouvrier maçon et de Luigia Carminatti , son épouse, sans profession.
Il passe par les casernes de gendarmerie d’Alès et de Saint Hippolyte du Fort. C’est là que naît son premier fils, Fernand le 14 septembre 1937 ; le second, Serge, né le 17 février 1945 sera posthume.
Il est mobilisé comme gendarme mobile au 15e bataillon d’infanterie légère pour encadrer et empêcher de déserter les « Joyeux », des prisonniers venus des bagnes coloniaux ou des centrales métropolitaines comme Fontevrault qui espéraient des grâces en contrepartie de leur engagement militaire.
Fait prisonnier à Epinal le 18 juin 1940, parqué pendant quatre jours dans une prairie à Bains les Bains (Vosges) puis au Frontstalag 121, il est libéré le 15 octobre 1940. Il bénéficie en effet d’une disposition de la commission d’armistice de Wiesbaden qui est chargée de l’application de l’armistice du 22 juin 1940. Pierre-Charles Serignan (1900-1995), chef d’escadron en gendarmerie responsable des gendarmes en zone occupée, obtient que les gendarmes prisonniers soient libérés pour assurer la police dans la zone occupée. Albert Balay rejoint alors avec sa famille la gendarmerie de Provenchères sur Fave (Vosges).
Il a fait partie comme toute la gendarmerie de Provenchères sur Fave du réseau « Sengler »[1] qui évacuait vers la Suisse des Alsaciens refusant l’incorporation et des pilotes alliés abattus en profitant de la proximité des gares de Saint Dié et de Lubine Colroy. Les dossiers de Caen lui attribuent aussi la participation à la destruction du tunnel ferroviaire de Saales-Lubine avec son chef, le maréchal des logis Firmin Tourteau, dans la nuit du 4 au 5 août 1944 et le sauvetage d’un pilote anglais. Son fils, Fernand se souvient que ce pilote a pris des repas à table avec eux.
Alors que la 3ème armée américaine commence son offensive en direction des Vosges, la majorité des forces de sécurité du Reich est rassemblée dans les Vosges, en majorité à Bruyères ; le 5 septembre 1944, Heinrich Himmler fera même une courte visite à Gerardmer pour donner ses ordres aux responsables de la Wehrmacht et des S.S., et particulièrement d’intensifier la lutte contre les maquis des Vosges (opération Waldfest).
Les quatre gendarmes, Albert Balay, Aloïs Eckert, Joseph Eyeret Firmin Tourteau sont arrêtés par la Gestapo dans la nuit du 10 au 11 octobre 1944 dans le cadre de cette répression accrue. A un moment de cette nuit, ils sont regroupés dans le domicile d’Albert Balay devant sa famille. Selon le témoignage des villageois qui les voient partir à pied pour Saales, ils ont été sauvagement battus à la fin de cette nuit dans les Caves Cunin, de grands hangars dont le propriétaire était monsieur Cunin, négociant en vin.
Le parcours de déportation d’Albert Balay est mouvementé. Il est d’abord interné à Schirmeck le 14 octobre 1944 où il est probablement torturé comme d’autres membres du réseau Sengler. Il est transféré le 29 octobre 1944 à Dachau (Matricule : 120933) et à nouveau transféré le 24 novembre 1944 à Auschwitz III.
Devant l’avancée de l’armée rouge, les détenus d’Auschwitz valides sont transférés en janvier et février 1945. Albert Balay d’après son numéro de matricule (125185) a dû faire partie du dernier convoi d’évacuation qui arriva à Mauthausen le 2 février 1945 avec 725 détenus. Il est affecté le 25 mars 1945 au kommando de Wels pour déblayer les conséquences des bombardements alliés puis au kommando de travail d’Ebensee. Par un retour macabre, lui qui avait échappé à la mine en devenant gendarme meurt dans la création des tunnels destinés aux usines souterraines d’armement.
Il meurt le 24 avril 1945 à l’âge de 34 ans. Ses trois collègues gendarmes meurent également en déportation.
Albert Balay connaît de nombreux honneurs posthumes. Il figure sur les monuments aux morts de Meyrannes, sa commune natale et de Provenchères sur Fave, sur le mémorial gardois de la Résistance et de la déportation et il a récemment été choisi comme parrain pour une promotion de l’école de gendarmerie de Chaumont. Il a également reçu plusieurs décorations : croix de guerre, médaille militaire, médaille de la résistance, médaille de la déportation.
Françoise FIEDLER
Sources :
[1] Annuaire de la Société d’histoire du Val de Villé 1995
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La plupart des informations personnelles ont été fournies par entretien téléphonique avec ses deux fils, Fernand et Serge Balay.
Albert Henri Balay est né le 24 avril 1911 à Meyrannes (Gard). C’est le fils de Rémi, Henri, Marius Balay et de Marie Louise née Agniel, son épouse.
Il suit l’école primaire à Clet, un hameau de Meyrannes ; il n’a plus ensuite qu’à traverser le pont métallique sur la Cèze pour devenir mineur de fond à Molières sur Cèze.
Un capitaine de gendarmerie, ami de sa famille, lui conseille de devenir gendarme et il s’engage comme gendarme mobile pour 18 mois le 19 janvier 1932 donc à vingt et un ans. Cet engagement est renouvelé de six mois en six mois au deuxième bataillon de l’air (ouvrier). A ce titre il aurait été sur le pont de la Concorde à Paris le 6 février 1934 lors de l’émeute antiparlementaire. Il est élevé garde à pied à la 7ème légion GRL le 3 mars 1936 puis garde mobile au 11ème GRM.
Le 12 février 1936, il épouse à Boucoiran (Gard) Elisa Bettinelli. Née à Poscante en Italie, elle est la fille d’Ambrogio Bettinelli, ouvrier maçon et de Luigia Carminatti , son épouse, sans profession.
Il passe par les casernes de gendarmerie d’Alès et de Saint Hippolyte du Fort. C’est là que naît son premier fils, Fernand le 14 septembre 1937 ; le second, Serge, né le 17 février 1945 sera posthume.
Il est mobilisé comme gendarme mobile au 15e bataillon d’infanterie légère pour encadrer et empêcher de déserter les « Joyeux », des prisonniers venus des bagnes coloniaux ou des centrales métropolitaines comme Fontevrault qui espéraient des grâces en contrepartie de leur engagement militaire.
Fait prisonnier à Epinal le 18 juin 1940, parqué pendant quatre jours dans une prairie à Bains les Bains (Vosges) puis au Frontstalag 121, il est libéré le 15 octobre 1940. Il bénéficie en effet d’une disposition de la commission d’armistice de Wiesbaden qui est chargée de l’application de l’armistice du 22 juin 1940. Pierre-Charles Serignan (1900-1995), chef d’escadron en gendarmerie responsable des gendarmes en zone occupée, obtient que les gendarmes prisonniers soient libérés pour assurer la police dans la zone occupée. Albert Balay rejoint alors avec sa famille la gendarmerie de Provenchères sur Fave (Vosges).
Il a fait partie comme toute la gendarmerie de Provenchères sur Fave du réseau « Sengler »[1] qui évacuait vers la Suisse des Alsaciens refusant l’incorporation et des pilotes alliés abattus en profitant de la proximité des gares de Saint Dié et de Lubine Colroy. Les dossiers de Caen lui attribuent aussi la participation à la destruction du tunnel ferroviaire de Saales-Lubine avec son chef, le maréchal des logis Firmin Tourteau, dans la nuit du 4 au 5 août 1944 et le sauvetage d’un pilote anglais. Son fils, Fernand se souvient que ce pilote a pris des repas à table avec eux.
Alors que la 3ème armée américaine commence son offensive en direction des Vosges, la majorité des forces de sécurité du Reich est rassemblée dans les Vosges, en majorité à Bruyères ; le 5 septembre 1944, Heinrich Himmler fera même une courte visite à Gerardmer pour donner ses ordres aux responsables de la Wehrmacht et des S.S., et particulièrement d’intensifier la lutte contre les maquis des Vosges (opération Waldfest).
Les quatre gendarmes, Albert Balay, Aloïs Eckert, Joseph Eyeret Firmin Tourteau sont arrêtés par la Gestapo dans la nuit du 10 au 11 octobre 1944 dans le cadre de cette répression accrue. A un moment de cette nuit, ils sont regroupés dans le domicile d’Albert Balay devant sa famille. Selon le témoignage des villageois qui les voient partir à pied pour Saales, ils ont été sauvagement battus à la fin de cette nuit dans les Caves Cunin, de grands hangars dont le propriétaire était monsieur Cunin, négociant en vin.
Le parcours de déportation d’Albert Balay est mouvementé. Il est d’abord interné à Schirmeck le 14 octobre 1944 où il est probablement torturé comme d’autres membres du réseau Sengler. Il est transféré le 29 octobre 1944 à Dachau (Matricule : 120933) et à nouveau transféré le 24 novembre 1944 à Auschwitz III.
Devant l’avancée de l’armée rouge, les détenus d’Auschwitz valides sont transférés en janvier et février 1945. Albert Balay d’après son numéro de matricule (125185) a dû faire partie du dernier convoi d’évacuation qui arriva à Mauthausen le 2 février 1945 avec 725 détenus. Il est affecté le 25 mars 1945 au kommando de Wels pour déblayer les conséquences des bombardements alliés puis au kommando de travail d’Ebensee. Par un retour macabre, lui qui avait échappé à la mine en devenant gendarme meurt dans la création des tunnels destinés aux usines souterraines d’armement.
Il meurt le 24 avril 1945 à l’âge de 34 ans. Ses trois collègues gendarmes meurent également en déportation.
Albert Balay connaît de nombreux honneurs posthumes. Il figure sur les monuments aux morts de Meyrannes, sa commune natale et de Provenchères sur Fave, sur le mémorial gardois de la Résistance et de la déportation et il a récemment été choisi comme parrain pour une promotion de l’école de gendarmerie de Chaumont. Il a également reçu plusieurs décorations : croix de guerre, médaille militaire, médaille de la résistance, médaille de la déportation.
Françoise FIEDLER
Sources :
[1] Annuaire de la Société d’histoire du Val de Villé 1995