HEIL Carl

  • 51205 Buchenwald

  • Né le 15 février 1901 à Elberfeld

  • Décédé le 17 novembre 1983 à Paris

Carl (dit Hébert Charles) est né le 15 février 1901 à Elberfeld (Allemagne) d’un père catholique, Antoine, et d’une mère protestante, Caroline Bukowski. C’est l’aîné de quatre enfants de cette famille d’origine modeste. Son père, issu d’une lignée d’agriculteurs, est maçon, syndicaliste gagné aux idées socialistes. Carl veut devenir instituteur mais en 1921 il entame des études de philosophie auprès de Max Scheller et se passionne pour le théâtre. Il joue dans diverses pièces à Cologne.

En 1927 il entre à la radio WDR (Westdeutscher Rundfunk) à Cologne, comme acteur de pièces radiophoniques puis comme metteur en ondes. Il dirige à ce titre tous les enregistrements sur disques. En 1931, dans le cadre d’une coopération entre la radio de Cologne et Radio Paris, il met en ondes une pièce radiophonique allemande. Il se lie avec Bertolt Brecht dont il partage la sensibilité communiste sans être membre de ce parti.

Le 15 février 1933, son domicile est perquisitionné. On l’accuse d’avoir brouillé les émissions national-socialistes. Il est rapidement congédié de la radio de Cologne en mars, peu après la nomination d’Hitler comme chancelier. On lui reproche ses idées à gauche et ses sympathies avec des artistes juifs. Fuyant le nazisme, il s’installe à Paris en avril 1933, s’inscrit immédiatement à « l’Association Jean-Christophe » pour le rapprochement franco-allemand. Il arrive à trouver des petits rôles dans des films après avoir fait la queue pour quelques subsides, travaillé comme plongeur et distributeur de prospectus.

En janvier 1937, il est engagé comme speaker de langue allemande à Radio PTT. Il est provisoirement écarté du micro en 1938 devant les campagnes de presse fustigeant les speakers allemands. Mais on l’entend de nouveau à partir de septembre 1939, dans les émissions de propagande anti-nazies réalisées à Paris, 107 rue de Grenelle, et diffusées par l’émetteur de radio Strasbourg à Brumath. Il est semble t’il condamné à mort par contumace en Allemagne pour ses émissions. Il se marie cette année-là le 9 décembre à Paris (14e) avec Elisabeth Thurey, née le 30 avril 1899 à Cologne. Sans enfant, le ménage est domicilié 15 rue Michel-Ange à Paris (16e)

Le 14 mai 1940, Carl Heil est brièvement enfermé dans un camp comme tous les citoyens allemands du territoire, y compris les anti-nazis comme lui. Trois semaines plus tard, le 6 juin, il est affecté au 15e dépôt d’Artillerie de Nîmes qui l’envoie aussitôt dans une Compagnie de Travailleurs Etrangers (CTE) à Langlade : d’abord la 319e puis deux mois plus tard la 304e, où il reste jusqu’au 1er décembre 1941. Il passe alors au 803e Groupement de Travailleurs Etrangers (GTE) de Beaucaire, dont il est détaché à Nîmes pendant toute l’année 1942.

Après sa démobilisation il habite à Nîmes, 27 rue Jean Reboul, trouve un emploi chez un pasteur suisse de cette ville puis exerce les fonctions de professeur d’allemand au collège privé Saint-Stanislas et à celui de l’Assomption. Le 22 juillet 1943 il est arrêté sur dénonciation par la Gestapo pour avoir eu une activité résistante avec le groupe protestant « La Cimade » et avoir agi au service de la propagande française. Deux jours plus tard, il est envoyé à Marseille où il reste jusqu’au 21 avril 1944. Il est alors interné à Compiègne au camp de Royallieu jusqu’au 12 mai suivant, jour de son départ en déportation par le transport I.211. Il arrive deux jours après à Buchenwald où on lui attribue le matricule 51205. Le 6 juin 1944 il est envoyé à la Baubrigade IV, dépendant du camp de Dora, et affecté au Kommando d’Ellrich Théâtre (« petit camp ») où il est nommé chef de « Block » en second, chargé de la surveillance de 600 hommes.

Lors de la terrible évacuation du camp par les Allemands à travers les montagnes du Hartz, il reste jusqu’au bout avec ses compagnons de déportation contrairement à d’autres membres de l’encadrement. Il est libéré le 10 avril 1945 par les Américains, rapatrié le 17 mai et revient à Paris où il est intégré à la Radiodiffusion Française. Sous le nom de Charles Hébert, il est le présentateur attitré des émissions en langue allemande et le restera jusqu’à sa retraite. Il obtient la nationalité française par décret du 11 mars 1949. Des attestations élogieuses comme celles du Chef de Service de la Section Allemagne-Autriche de la Radiodiffusion française, M. Henri Jourdan (août 1945) et celle du Colonel de Saint-Albert, du Réseau Navarre-France combattante, datée de mars 1946 et des témoignages de codétenus sur sa bonne conduite au camp figurent dans son dossier.

Il est reconnu déporté politique en mai 1968 après un avis pourtant défavorable de 1964 suite à une accusation d’avoir eu au camp de concentration une attitude incompatible avec l’esprit de solidarité des déportés. Des témoignages d’une conduite élogieuse ont permis de ne pas prendre en considération cette accusation. (Courrier d’avril 1949). Carl habite 11 place Adolphe Chérieux Paris (15e) à cette époque.

Ami de Jean Vilar, du mime Marceau, de Roger Planchon, il contribue à les faire connaître en Allemagne. Le 17 novembre 1983 Carl Heil décède de la maladie de Parkinson dans son petit appartement parisien, à l’âge de 82 ans.

Rédacteur : Georges Muller

Sources :

Eveline et Yvan Brès et Brès « CARL HEIL Speaker contre Hitler » Les Editions de Paris 1994

http://100ansderadio.free.fr/Biographies/Heil_Carl.html

Préface du livre « Hommage à Carl Heil » de Jean-Michel Palmier, Professeur d’Esthétique à l’Université de Paris 1 Panthéon Sorbonne (1994)

Dossier de Caen 21 P 624 890 (dont photo)

Vous avez un complément d’informations ? N’hésitez pas nous le faire savoir.

HEIL Carl

  • 51205 Buchenwald

  • Né le 15 février 1901 à Elberfeld

  • Décédé le 17 novembre 1983 à Paris

Carl (dit Hébert Charles) est né le 15 février 1901 à Elberfeld (Allemagne) d’un père catholique, Antoine, et d’une mère protestante, Caroline Bukowski. C’est l’aîné de quatre enfants de cette famille d’origine modeste. Son père, issu d’une lignée d’agriculteurs, est maçon, syndicaliste gagné aux idées socialistes. Carl veut devenir instituteur mais en 1921 il entame des études de philosophie auprès de Max Scheller et se passionne pour le théâtre. Il joue dans diverses pièces à Cologne.

En 1927 il entre à la radio WDR (Westdeutscher Rundfunk) à Cologne, comme acteur de pièces radiophoniques puis comme metteur en ondes. Il dirige à ce titre tous les enregistrements sur disques. En 1931, dans le cadre d’une coopération entre la radio de Cologne et Radio Paris, il met en ondes une pièce radiophonique allemande. Il se lie avec Bertolt Brecht dont il partage la sensibilité communiste sans être membre de ce parti.

Le 15 février 1933, son domicile est perquisitionné. On l’accuse d’avoir brouillé les émissions national-socialistes. Il est rapidement congédié de la radio de Cologne en mars, peu après la nomination d’Hitler comme chancelier. On lui reproche ses idées à gauche et ses sympathies avec des artistes juifs. Fuyant le nazisme, il s’installe à Paris en avril 1933, s’inscrit immédiatement à « l’Association Jean-Christophe » pour le rapprochement franco-allemand. Il arrive à trouver des petits rôles dans des films après avoir fait la queue pour quelques subsides, travaillé comme plongeur et distributeur de prospectus.

En janvier 1937, il est engagé comme speaker de langue allemande à Radio PTT. Il est provisoirement écarté du micro en 1938 devant les campagnes de presse fustigeant les speakers allemands. Mais on l’entend de nouveau à partir de septembre 1939, dans les émissions de propagande anti-nazies réalisées à Paris, 107 rue de Grenelle, et diffusées par l’émetteur de radio Strasbourg à Brumath. Il est semble t’il condamné à mort par contumace en Allemagne pour ses émissions. Il se marie cette année-là le 9 décembre à Paris (14e) avec Elisabeth Thurey, née le 30 avril 1899 à Cologne. Sans enfant, le ménage est domicilié 15 rue Michel-Ange à Paris (16e)

Le 14 mai 1940, Carl Heil est brièvement enfermé dans un camp comme tous les citoyens allemands du territoire, y compris les anti-nazis comme lui. Trois semaines plus tard, le 6 juin, il est affecté au 15e dépôt d’Artillerie de Nîmes qui l’envoie aussitôt dans une Compagnie de Travailleurs Etrangers (CTE) à Langlade : d’abord la 319e puis deux mois plus tard la 304e, où il reste jusqu’au 1er décembre 1941. Il passe alors au 803e Groupement de Travailleurs Etrangers (GTE) de Beaucaire, dont il est détaché à Nîmes pendant toute l’année 1942.

Après sa démobilisation il habite à Nîmes, 27 rue Jean Reboul, trouve un emploi chez un pasteur suisse de cette ville puis exerce les fonctions de professeur d’allemand au collège privé Saint-Stanislas et à celui de l’Assomption. Le 22 juillet 1943 il est arrêté sur dénonciation par la Gestapo pour avoir eu une activité résistante avec le groupe protestant « La Cimade » et avoir agi au service de la propagande française. Deux jours plus tard, il est envoyé à Marseille où il reste jusqu’au 21 avril 1944. Il est alors interné à Compiègne au camp de Royallieu jusqu’au 12 mai suivant, jour de son départ en déportation par le transport I.211. Il arrive deux jours après à Buchenwald où on lui attribue le matricule 51205. Le 6 juin 1944 il est envoyé à la Baubrigade IV, dépendant du camp de Dora, et affecté au Kommando d’Ellrich Théâtre (« petit camp ») où il est nommé chef de « Block » en second, chargé de la surveillance de 600 hommes.

Lors de la terrible évacuation du camp par les Allemands à travers les montagnes du Hartz, il reste jusqu’au bout avec ses compagnons de déportation contrairement à d’autres membres de l’encadrement. Il est libéré le 10 avril 1945 par les Américains, rapatrié le 17 mai et revient à Paris où il est intégré à la Radiodiffusion Française. Sous le nom de Charles Hébert, il est le présentateur attitré des émissions en langue allemande et le restera jusqu’à sa retraite. Il obtient la nationalité française par décret du 11 mars 1949. Des attestations élogieuses comme celles du Chef de Service de la Section Allemagne-Autriche de la Radiodiffusion française, M. Henri Jourdan (août 1945) et celle du Colonel de Saint-Albert, du Réseau Navarre-France combattante, datée de mars 1946 et des témoignages de codétenus sur sa bonne conduite au camp figurent dans son dossier.

Il est reconnu déporté politique en mai 1968 après un avis pourtant défavorable de 1964 suite à une accusation d’avoir eu au camp de concentration une attitude incompatible avec l’esprit de solidarité des déportés. Des témoignages d’une conduite élogieuse ont permis de ne pas prendre en considération cette accusation. (Courrier d’avril 1949). Carl habite 11 place Adolphe Chérieux Paris (15e) à cette époque.

Ami de Jean Vilar, du mime Marceau, de Roger Planchon, il contribue à les faire connaître en Allemagne. Le 17 novembre 1983 Carl Heil décède de la maladie de Parkinson dans son petit appartement parisien, à l’âge de 82 ans.

Rédacteur : Georges Muller

Sources :

Eveline et Yvan Brès et Brès « CARL HEIL Speaker contre Hitler » Les Editions de Paris 1994

http://100ansderadio.free.fr/Biographies/Heil_Carl.html

Préface du livre « Hommage à Carl Heil » de Jean-Michel Palmier, Professeur d’Esthétique à l’Université de Paris 1 Panthéon Sorbonne (1994)

Dossier de Caen 21 P 624 890 (dont photo)

Vous avez un complément d’informations ? N’hésitez pas nous le faire savoir.