TICHAUER Kurt

  • 27597 Buchenwald – 178844 Auschwitz

  • Né le 18 décembre 1915 en Pologne

  • Décédé dans le New-Jersey (USA) en mai 1981

Kurt Tichauer naît à Gross Dubensko le 18 décembre 1915, dans une famille juive installée en Haute-Silésie, région alors rattachée à l’Allemagne. Son père, Wilhelm Tichauer est né en 1878, lui aussi à Gross Dubensko. Sa mère, Selma Brenner est née la même année à Kochlowitz. Kurt a un frère plus âgé, Jonas, né le 18 avril 1907 à Königshütte [i].

Lors du plébiscite sur la Haute-Silésie en 1921, la famille vit probablement à Gross Dubensko, qui vote pour s’intégrer à la Pologne tandis que la grande ville voisine, Gleiwitz, reste allemande. De ce fait, les Tichauer semblent avoir acquis la nationalité polonaise [ii]. Mais dès 1922, ils s’installent définitivement à Gleiwitz où Wihlelm, le père, devient commerçant.

A la fin des années 1930, Kurt trouve un emploi de distillateur. Son destin change radicalement en novembre 1938. Après la fameuse Nuit de cristal, il est arrêté et déporté à Buchenwald (matricule 27597). Il y effectue un travail forcé pour lequel il touche quelques marks et subit de mauvais traitements. Libéré le 6 décembre 1938, il émigre six mois plus tard en compagnie de son frère Jonas, trouvant asile à Bruxelles, 25 rue Saint Ghislain.

Cet asile se révèle cependant très précaire : comme des milliers de réfugiés juifs venus d’Allemagne et considérés comme potentiellement favorables à l’ennemi, les deux frères sont arrêtés dans la capitale par les autorités belges et expulsés ensemble vers la France le 10 mai 1940. Le convoi les amène dans la région d’Orléans : à Cepoy et Cerdon-du-Loiret. Ils transitent ensuite par le camp du Fauga-Mazères (Haute-Garonne), d’où ils repartent le 15 mai pour celui de Saint-Cyprien (Pyrénées-Orientales) ; ils y arrivent fin mai. En octobre, des inondations catastrophiques imposent le déplacement des internés. Kurt et Jonas sont alors envoyés à Rivesaltes, au centre dit d’hébergement pour les « étrangers indésirables », en majorité des juifs.

À partir de ce moment, on ne connaît plus le parcours de Jonas : ni où il a été envoyé, ni où il a été arrêté. Mais on sait qu’il est déporté par le convoi 21, du 19 août 1942 pour Auschwitz et qu’il ne reviendra pas. De leur côté, les parents de Kurt et Jonas, restés à Gleiwitz sont déportés eux aussi à Auschwitz le 20 mai 1942, sans retour.

De Rivesaltes, Kurt est ensuite envoyé dans le Gard pour rejoindre un Groupement de Travailleurs Étrangers. Il passe ainsi plusieurs mois dans les mines de charbon de La Grand-Combe, avant d’être arrêté à Nîmes, probablement début septembre 1942. D’abord dirigé vers le Camp des Milles, il est enregistré à son arrivée à Drancy comme ouvrier mineur, ce qui correspond à son dernier emploi à La Grand-Combe. Le 30 septembre 1942, il est déporté par le convoi n° 30, vers Auschwitz où il reçoit un second matricule, le n°178844. Début novembre on l’affecte au camp de Blechhammer, camp annexe d’Auschwitz spécialisé dans la chimie. Il évoquera plus tard les traitements inhumains infligés par les SS dans ce camp, spécialement dans la partie réservée aux juifs, le ZAL, (Zwangsarbeitslager für Judenil). Mais, malgré la malnutrition, la dureté du travail et les sévices, il tient et il tient même longtemps.

Avec l’avancée de l’Armée Rouge, commencent les évacuations successives des déportés vers l’Ouest. Elles se font, à partir du 21 janvier 1945, dans une pagaille indescriptible doublée d’une férocité sans nom. Kurt est d’abord envoyé au camp de Gross-Rosen, il s’y trouve début février 1945. Une fiche médicale indique son poids : 51 kg pour 1m 65, ainsi qu’une dentition médiocre. Puis l’évacuation continuant toujours vers l’ouest, il arrive le 10 février à Weimar, gagne Buchenwald et attend avec les détenus encore présents, la libération du camp. La 3ème armée américaine entre dans le camp le 11 avril 1945. Libéré, Kurt est suivi pour des soins ; son état de santé lui permet d’entamer son retour le 6 juin vers Bruxelles où il regagne son domicile, 28 rue Verte.

Il se marie en août 1949, à Bruxelles, avec une jeune femme d’origine tchécoslovaque prénommée Bruchla/Bertha, née en 1922 à Vysni-Upsa. Il a 34 ans. Le 1er décembre 1949 naît leur fils Henri. Tous les trois émigrent aux Etats-Unis sur le paquebot « Ile de France », parti du Havre le 10 novembre 1950 et arrivent à New-York six jours plus tard. Ils sont alors apatrides. Leur adresse de destination : 640 Struyvesdut Ave, Irvington (New Jersey). C’est là que le 12 janvier 1955 naît leur fille, Lise.

Kurt se sépare de son épouse vers 1956. Il s’installe alors au 1109A à Broad St, Newak (New jersey). En février 1957, il fait une demande de naturalisation américaine, qui lui est refusée. Il meurt en mai 1981, à l’âge de 66 ans, dans l’état du New-Jersey.

Marie Balta, Gérard Krebs et Eric Bernard.

[i]Gross Dubensko, Kochlowitz, Königshütte sont trois villages situés aux alentours de Gleiwitz. Ces quatre localités sont toutes aujourd’hui en Pologne et se nomment respectivement : Debiensko (anciennement Debiensko Wielce), Kochlowice, Chorzow et Gliwice.

[ii] Lors du recensement effectué par les autorités allemandes en 1939, la famille est considérée comme polonaise, faisant ainsi partie d’une minorité confrontée aux persécutions à double titre : la nationalité et la confession.

Sources :

– Arolsen, AFMD, Fiches de Drancy, Gross-Rosen et Buchenwald

– Site Myheritage (liste de passagers arrivés à Ellis Island ; demande de naturalisation, arbre généalogique famille Tichauer)

– Das Bundesarchiv, Memorial Book  ( https://www.bundesarchiv.de/gedenkbuch/en;jsessionid=17jDLzeKLmBBGOO71VbpsKF-p_aa0YwsySYhI8_g.koresi).
– « La liste de St Cyprien » par Marcel Bervoets.
– Site Wikipedia : ville de Dubensko.
– Camp de Cepoy, Histoire pénitentiaire et justice militaire. Blog de Jacky Tronel du 8 mai 2010.

– La République Du Centre. 23 juin 2013. Article sur « l’internement, en 1941 et 1942 de juifs et étrangers dans une ferme de Cerdon ».    

– Archives Départementales des Pyrénées Orientales. Rivesaltes.
– Site Wikipedia : Camps de Blechhammer et Camp de Gross-Rosen.
– Cercle d’Études de la Déportation et de la Shoah : « L’évacuation de Blechhammer ». Article daté du 24 janvier 2015
– « Des marches de la mort au retour à la vie, des rescapés des camps nazis racontent »  Documentaire Stéphanie Perrin et Sarah Timperman. Édité par Fondation d’Auschwitz, Centre d’Études et de Documentations.

– Association Française Buchenwald, Dora et Kommandos « La libération du Camp de Buchenwald ».

– « 1942-1944 Drancy-Auxchwitz » Kazerne Dossin (photo)

Vous avez un complément d’informations ? N’hésitez pas nous le faire savoir.

TICHAUER Kurt

  • 27597 Buchenwald – 178844 Auschwitz

  • Né le 18 décembre 1915 en Pologne

  • Décédé dans le New-Jersey (USA) en mai 1981

Kurt Tichauer naît à Gross Dubensko le 18 décembre 1915, dans une famille juive installée en Haute-Silésie, région alors rattachée à l’Allemagne. Son père, Wilhelm Tichauer est né en 1878, lui aussi à Gross Dubensko. Sa mère, Selma Brenner est née la même année à Kochlowitz. Kurt a un frère plus âgé, Jonas, né le 18 avril 1907 à Königshütte [i].

Lors du plébiscite sur la Haute-Silésie en 1921, la famille vit probablement à Gross Dubensko, qui vote pour s’intégrer à la Pologne tandis que la grande ville voisine, Gleiwitz, reste allemande. De ce fait, les Tichauer semblent avoir acquis la nationalité polonaise [ii]. Mais dès 1922, ils s’installent définitivement à Gleiwitz où Wihlelm, le père, devient commerçant.

A la fin des années 1930, Kurt trouve un emploi de distillateur. Son destin change radicalement en novembre 1938. Après la fameuse Nuit de cristal, il est arrêté et déporté à Buchenwald (matricule 27597). Il y effectue un travail forcé pour lequel il touche quelques marks et subit de mauvais traitements. Libéré le 6 décembre 1938, il émigre six mois plus tard en compagnie de son frère Jonas, trouvant asile à Bruxelles, 25 rue Saint Ghislain.

Cet asile se révèle cependant très précaire : comme des milliers de réfugiés juifs venus d’Allemagne et considérés comme potentiellement favorables à l’ennemi, les deux frères sont arrêtés dans la capitale par les autorités belges et expulsés ensemble vers la France le 10 mai 1940. Le convoi les amène dans la région d’Orléans : à Cepoy et Cerdon-du-Loiret. Ils transitent ensuite par le camp du Fauga-Mazères (Haute-Garonne), d’où ils repartent le 15 mai pour celui de Saint-Cyprien (Pyrénées-Orientales) ; ils y arrivent fin mai. En octobre, des inondations catastrophiques imposent le déplacement des internés. Kurt et Jonas sont alors envoyés à Rivesaltes, au centre dit d’hébergement pour les « étrangers indésirables », en majorité des juifs.

À partir de ce moment, on ne connaît plus le parcours de Jonas : ni où il a été envoyé, ni où il a été arrêté. Mais on sait qu’il est déporté par le convoi 21, du 19 août 1942 pour Auschwitz et qu’il ne reviendra pas. De leur côté, les parents de Kurt et Jonas, restés à Gleiwitz sont déportés eux aussi à Auschwitz le 20 mai 1942, sans retour.

De Rivesaltes, Kurt est ensuite envoyé dans le Gard pour rejoindre un Groupement de Travailleurs Étrangers. Il passe ainsi plusieurs mois dans les mines de charbon de La Grand-Combe, avant d’être arrêté à Nîmes, probablement début septembre 1942. D’abord dirigé vers le Camp des Milles, il est enregistré à son arrivée à Drancy comme ouvrier mineur, ce qui correspond à son dernier emploi à La Grand-Combe. Le 30 septembre 1942, il est déporté par le convoi n° 30, vers Auschwitz où il reçoit un second matricule, le n°178844. Début novembre on l’affecte au camp de Blechhammer, camp annexe d’Auschwitz spécialisé dans la chimie. Il évoquera plus tard les traitements inhumains infligés par les SS dans ce camp, spécialement dans la partie réservée aux juifs, le ZAL, (Zwangsarbeitslager für Judenil). Mais, malgré la malnutrition, la dureté du travail et les sévices, il tient et il tient même longtemps.

Avec l’avancée de l’Armée Rouge, commencent les évacuations successives des déportés vers l’Ouest. Elles se font, à partir du 21 janvier 1945, dans une pagaille indescriptible doublée d’une férocité sans nom. Kurt est d’abord envoyé au camp de Gross-Rosen, il s’y trouve début février 1945. Une fiche médicale indique son poids : 51 kg pour 1m 65, ainsi qu’une dentition médiocre. Puis l’évacuation continuant toujours vers l’ouest, il arrive le 10 février à Weimar, gagne Buchenwald et attend avec les détenus encore présents, la libération du camp. La 3ème armée américaine entre dans le camp le 11 avril 1945. Libéré, Kurt est suivi pour des soins ; son état de santé lui permet d’entamer son retour le 6 juin vers Bruxelles où il regagne son domicile, 28 rue Verte.

Il se marie en août 1949, à Bruxelles, avec une jeune femme d’origine tchécoslovaque prénommée Bruchla/Bertha, née en 1922 à Vysni-Upsa. Il a 34 ans. Le 1er décembre 1949 naît leur fils Henri. Tous les trois émigrent aux Etats-Unis sur le paquebot « Ile de France », parti du Havre le 10 novembre 1950 et arrivent à New-York six jours plus tard. Ils sont alors apatrides. Leur adresse de destination : 640 Struyvesdut Ave, Irvington (New Jersey). C’est là que le 12 janvier 1955 naît leur fille, Lise.

Kurt se sépare de son épouse vers 1956. Il s’installe alors au 1109A à Broad St, Newak (New jersey). En février 1957, il fait une demande de naturalisation américaine, qui lui est refusée. Il meurt en mai 1981, à l’âge de 66 ans, dans l’état du New-Jersey.

Marie Balta, Gérard Krebs et Eric Bernard.

[i]Gross Dubensko, Kochlowitz, Königshütte sont trois villages situés aux alentours de Gleiwitz. Ces quatre localités sont toutes aujourd’hui en Pologne et se nomment respectivement : Debiensko (anciennement Debiensko Wielce), Kochlowice, Chorzow et Gliwice.

[ii] Lors du recensement effectué par les autorités allemandes en 1939, la famille est considérée comme polonaise, faisant ainsi partie d’une minorité confrontée aux persécutions à double titre : la nationalité et la confession.

Sources :

– Arolsen, AFMD, Fiches de Drancy, Gross-Rosen et Buchenwald

– Site Myheritage (liste de passagers arrivés à Ellis Island ; demande de naturalisation, arbre généalogique famille Tichauer)

– Das Bundesarchiv, Memorial Book  ( https://www.bundesarchiv.de/gedenkbuch/en;jsessionid=17jDLzeKLmBBGOO71VbpsKF-p_aa0YwsySYhI8_g.koresi).
– « La liste de St Cyprien » par Marcel Bervoets.
– Site Wikipedia : ville de Dubensko.
– Camp de Cepoy, Histoire pénitentiaire et justice militaire. Blog de Jacky Tronel du 8 mai 2010.

– La République Du Centre. 23 juin 2013. Article sur « l’internement, en 1941 et 1942 de juifs et étrangers dans une ferme de Cerdon ».    

– Archives Départementales des Pyrénées Orientales. Rivesaltes.
– Site Wikipedia : Camps de Blechhammer et Camp de Gross-Rosen.
– Cercle d’Études de la Déportation et de la Shoah : « L’évacuation de Blechhammer ». Article daté du 24 janvier 2015
– « Des marches de la mort au retour à la vie, des rescapés des camps nazis racontent »  Documentaire Stéphanie Perrin et Sarah Timperman. Édité par Fondation d’Auschwitz, Centre d’Études et de Documentations.

– Association Française Buchenwald, Dora et Kommandos « La libération du Camp de Buchenwald ».

– « 1942-1944 Drancy-Auxchwitz » Kazerne Dossin (photo)

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