RECHERCHEZ
Bryna dite Betty Galant est issue d’une famille juive polonaise, de nationalité russe (1). Ses parents Yehudah Galant (1898-1943) et Rosa/Rose Horowitz (1894-1943) quittent la Pologne en 1918, pour s’établir en Allemagne. Betty naît le 4 avril 1920 à Leipzig, tout comme sa sœur Renée, le 14 juillet 1921, et son frère Abraham/Adolphe, le 21 août 1922.
En 1924, la famille émigre à Paris, dans l’idée d’aller ensuite aux Etats-Unis. Les visas lui ayant été refusés, elle s’établit pour de bon dans la capitale où le père, Yehudah, crée une entreprise de maroquinerie. C’est là que naît le plus jeune frère de Betty : David, le 18 mars 1927.
Vers la fin des années 1930, Betty devient malletière, suivant la tradition familiale. A cette époque, son père a comme fournisseurs des cartonniers : Mordka Szatkownik et son fils Henry, né le 6 octobre 1911 à Varsovie (Pologne). Cette relation d’affaires donne l’occasion à Betty Galant et Henry Szatkownik de se fréquenter. Fiancés, les jeunes gens n’ont pas le temps de se marier car, en mai 1940, Henry s’engage volontairement dans la Légion Etrangère. Incorporé dans le bataillon d’instruction des pionniers étrangers, il est libéré quelques mois plus tard, le 9 septembre.
Au début de l’Occupation, les Galant restent à Paris. Mais aussitôt après la première rafle du printemps 1941, ils décident de franchir clandestinement la ligne de démarcation pour se réfugier en zone libre. Ils passent en plusieurs groupes, se rassemblant à Lyon, avant de s’installer à Nîmes, au mois d’octobre. Le père, Yehudah trouve pour sa famille une petite maison au 19 bis rue de la Servie. Henry les y rejoint, fin 1941.
Après avoir été arrêté en tant qu’étranger en situation irrégulière, Henry est interné au camp de Gurs (Pyrénées-Atlantiques), le 21 février 1942. Faisant preuve de beaucoup de détermination, Betty parvient à rendre plusieurs visites à son fiancé, avant que celui-ci ne soit libéré le 8 juillet. Le mariage d’Henry et Betty peut enfin se célébrer à Nîmes le 8 septembre 1942.
Cependant la joie de ce mariage est assombrie par l’arrivée des Allemands en zone libre. En mars 1943, les Galant sont avertis de l’imminence de rafles. Le couple Szatkownik et toute la famille Galant quittent précipitamment Nîmes pour Nice (Alpes-Maritimes) sous occupation italienne, beaucoup plus tolérante. Mais ils y sont tous arrêtés par les Italiens dès le 4 avril et assignés à résidence à Saint-Martin-Vésubie, au nord du département.
Installés à « l’Hôtel de la Gare », les Szatkownik et les Galant mènent une vie relativement plaisante. La principale contrainte est de se présenter deux fois par jour auprès des carabiniers. Le 13 juillet, Henry et Betty deviennent les heureux parents d’un petit Daniel. Mais deux mois plus tard, des contacts avec la Résistance les avertissent de quitter de toute urgence Saint-Martin-Vésubie pour Cuneo (Italie) car la zone d’occupation italienne est sur le point de passer sous contrôle allemand. Les instructions précisent qu’après la longue traversée des Alpes à pied, un train les attendra pour les emmener à Rome où ils devraient pouvoir se fondre dans la population en attendant les Alliés.
En tout un millier de personnes, réparties en plusieurs groupes, entament ce voyage éprouvant passant par le col de Fenestre (Alpes-Maritimes). Le couple Szatkownik avec son bébé Daniel et la quasi-totalité des Galant font partie du premier groupe. Hélas, peu avant Cuneo, dans le village italien de Borgo San Dalmazo, au lieu de partisans locaux, c’est la 12e Compagnie de Panzer Division qui les attend. Tout le monde est pris par les Allemands, sauf quelques rescapés qui arrivent à prévenir les groupes suivants.
Les quelques 300 prisonniers sont internés à la caserne du village, avant d’être envoyés à Drancy. Ils y entrent le 23 novembre 1943 ; Henry y reçoit le matricule 8517, Betty le 8518 (2) et Daniel le 8519. Avec tous les Galant, ils sont déportés à Auschwitz par le convoi 64 du 7 décembre. Ils arrivent à destination trois jours plus tard. Betty et Daniel, âgé de 5 mois, sont gazés tout de suite (3). Henry, affecté au camp de Monowitz (Auschwitz III) avec le matricule 167657 sera finalement libéré en mai 1945.
Une grande partie de la famille de Betty est victime des nazis, notamment ses parents, sa sœur Rénée avec son mari Paul Apelbaum, ses frères Adolphe et David. Seul ce dernier survivra.
Le nom de Betty Szatkownik figure sur le mur des noms du Mémorial de la Shoah dalle 45, colonne 15, rangée 3.
Rédacteur : Gérard Krebs
Sources :
Dossier Caen N° 21 P 679373
Archives départementales des Pyrénées Atlantiques, Camp de Gurs, cote 72W69 et 72W313, octobre 2024
Mémorial de la Shoah
Archives Départementales du Gard, Fichier des juifs français et étrangers, cote 1W139
« Lest we forget / The Memoirs of David H. Galant » Livre autopublié en 2012 par Risa Galant, d’où est extraite la photo de Betty (Paris début 1941).
Notes:
(1) La famille est originaire de Dobrzyń-an-Drweca, petite ville du royaume de Pologne, alors intégré à la Russie.
(2) Carnet de fouille N° 36, on lui saisit 1.000 lires italiennes et 20 francs français.
(3) Selon le témoignage de David Galant, les femmes du camp auraient averti les nouvelles arrivantes de prétendre ne pas connaître les enfants qui les accompagnaient. Sans enfants, elles avaient une chance d’être sélectionnées pour le travail ; avec des enfants, elles étaient assurées d’aller à la mort. Comme les autres, Betty ne les a pas cru. Ainsi que le relève David Galant : de toutes façons, quelle mère aurait été capable de suivre un tel conseil ?
RECHERCHEZ
Bryna dite Betty Galant est issue d’une famille juive polonaise, de nationalité russe (1). Ses parents Yehudah Galant (1898-1943) et Rosa/Rose Horowitz (1894-1943) quittent la Pologne en 1918, pour s’établir en Allemagne. Betty naît le 4 avril 1920 à Leipzig, tout comme sa sœur Renée, le 14 juillet 1921, et son frère Abraham/Adolphe, le 21 août 1922.
En 1924, la famille émigre à Paris, dans l’idée d’aller ensuite aux Etats-Unis. Les visas lui ayant été refusés, elle s’établit pour de bon dans la capitale où le père, Yehudah, crée une entreprise de maroquinerie. C’est là que naît le plus jeune frère de Betty : David, le 18 mars 1927.
Vers la fin des années 1930, Betty devient malletière, suivant la tradition familiale. A cette époque, son père a comme fournisseurs des cartonniers : Mordka Szatkownik et son fils Henry, né le 6 octobre 1911 à Varsovie (Pologne). Cette relation d’affaires donne l’occasion à Betty Galant et Henry Szatkownik de se fréquenter. Fiancés, les jeunes gens n’ont pas le temps de se marier car, en mai 1940, Henry s’engage volontairement dans la Légion Etrangère. Incorporé dans le bataillon d’instruction des pionniers étrangers, il est libéré quelques mois plus tard, le 9 septembre.
Au début de l’Occupation, les Galant restent à Paris. Mais aussitôt après la première rafle du printemps 1941, ils décident de franchir clandestinement la ligne de démarcation pour se réfugier en zone libre. Ils passent en plusieurs groupes, se rassemblant à Lyon, avant de s’installer à Nîmes, au mois d’octobre. Le père, Yehudah trouve pour sa famille une petite maison au 19 bis rue de la Servie. Henry les y rejoint, fin 1941.
Après avoir été arrêté en tant qu’étranger en situation irrégulière, Henry est interné au camp de Gurs (Pyrénées-Atlantiques), le 21 février 1942. Faisant preuve de beaucoup de détermination, Betty parvient à rendre plusieurs visites à son fiancé, avant que celui-ci ne soit libéré le 8 juillet. Le mariage d’Henry et Betty peut enfin se célébrer à Nîmes le 8 septembre 1942.
Cependant la joie de ce mariage est assombrie par l’arrivée des Allemands en zone libre. En mars 1943, les Galant sont avertis de l’imminence de rafles. Le couple Szatkownik et toute la famille Galant quittent précipitamment Nîmes pour Nice (Alpes-Maritimes) sous occupation italienne, beaucoup plus tolérante. Mais ils y sont tous arrêtés par les Italiens dès le 4 avril et assignés à résidence à Saint-Martin-Vésubie, au nord du département.
Installés à « l’Hôtel de la Gare », les Szatkownik et les Galant mènent une vie relativement plaisante. La principale contrainte est de se présenter deux fois par jour auprès des carabiniers. Le 13 juillet, Henry et Betty deviennent les heureux parents d’un petit Daniel. Mais deux mois plus tard, des contacts avec la Résistance les avertissent de quitter de toute urgence Saint-Martin-Vésubie pour Cuneo (Italie) car la zone d’occupation italienne est sur le point de passer sous contrôle allemand. Les instructions précisent qu’après la longue traversée des Alpes à pied, un train les attendra pour les emmener à Rome où ils devraient pouvoir se fondre dans la population en attendant les Alliés.
En tout un millier de personnes, réparties en plusieurs groupes, entament ce voyage éprouvant passant par le col de Fenestre (Alpes-Maritimes). Le couple Szatkownik avec son bébé Daniel et la quasi-totalité des Galant font partie du premier groupe. Hélas, peu avant Cuneo, dans le village italien de Borgo San Dalmazo, au lieu de partisans locaux, c’est la 12e Compagnie de Panzer Division qui les attend. Tout le monde est pris par les Allemands, sauf quelques rescapés qui arrivent à prévenir les groupes suivants.
Les quelques 300 prisonniers sont internés à la caserne du village, avant d’être envoyés à Drancy. Ils y entrent le 23 novembre 1943 ; Henry y reçoit le matricule 8517, Betty le 8518 (2) et Daniel le 8519. Avec tous les Galant, ils sont déportés à Auschwitz par le convoi 64 du 7 décembre. Ils arrivent à destination trois jours plus tard. Betty et Daniel, âgé de 5 mois, sont gazés tout de suite (3). Henry, affecté au camp de Monowitz (Auschwitz III) avec le matricule 167657 sera finalement libéré en mai 1945.
Une grande partie de la famille de Betty est victime des nazis, notamment ses parents, sa sœur Rénée avec son mari Paul Apelbaum, ses frères Adolphe et David. Seul ce dernier survivra.
Le nom de Betty Szatkownik figure sur le mur des noms du Mémorial de la Shoah dalle 45, colonne 15, rangée 3.
Rédacteur : Gérard Krebs
Sources :
Dossier Caen N° 21 P 679373
Archives départementales des Pyrénées Atlantiques, Camp de Gurs, cote 72W69 et 72W313, octobre 2024
Mémorial de la Shoah
Archives Départementales du Gard, Fichier des juifs français et étrangers, cote 1W139
« Lest we forget / The Memoirs of David H. Galant » Livre autopublié en 2012 par Risa Galant, d’où est extraite la photo de Betty (Paris début 1941).
Notes:
(1) La famille est originaire de Dobrzyń-an-Drweca, petite ville du royaume de Pologne, alors intégré à la Russie.
(2) Carnet de fouille N° 36, on lui saisit 1.000 lires italiennes et 20 francs français.
(3) Selon le témoignage de David Galant, les femmes du camp auraient averti les nouvelles arrivantes de prétendre ne pas connaître les enfants qui les accompagnaient. Sans enfants, elles avaient une chance d’être sélectionnées pour le travail ; avec des enfants, elles étaient assurées d’aller à la mort. Comme les autres, Betty ne les a pas cru. Ainsi que le relève David Galant : de toutes façons, quelle mère aurait été capable de suivre un tel conseil ?




