RECHERCHEZ
Le père de Kurt, Joseph Nordhäuser est un allemand de confession juive, né le 28 mars 1876 à Wüstensachsen à la périphérie d’Ehrenberg, dans le comté de Kassel (Hesse). Sa mère, Johana, est née Löbenstein, le 28 mars 1875 à Marköbel, près de Francfort-sur-le-Main, dans le Land de Hesse. C’est là également que naît Kurt, Levi, le 27 août 1907. Pendant l’entre-deux guerres, les Nordhäuser vivent dans l’ancien ghetto de Francfort, devenu le quartier juif, au 52 Wollgraben.
Vers la fin des années 1920, Kurt épouse Gerta Skama (ou Kama), née le 15 juin 1906 à Francfort. Ils auront deux enfants, tous deux nés dans cette ville : Edith, le 12 août 1930 et Günther le 24 mars 1936. La famille réside en dernier lieu au 48 rue Bonheimer.
En 1939, Gerta figure sur les listes de recensement des minorités en Allemagne. On sait par ailleurs que son mari Kurt se réfugie en Belgique à peu près à cette époque. Est-il parti seul pour préparer la venue de sa famille ou parents et enfants sont-ils partis ensemble dans le courant de l’année 1939, la question reste entière.
Toujours est-t-il que Kurt, domicilié au 29 rue verte à Bruxelles est, comme plusieurs milliers d’autres personnes, incarcéré par les autorités belges le 10 mai 1940, suite à un arrêté ministériel publié le jour même, stipulant : « Les étrangers de sexe masculin nés entre le 1er janvier 1881 et le 31 décembre 1923, […] ressortissants ennemis, sont tenus de se présenter à la maison communale de leur résidence […] dans un délai de deux heures à compter de l’affichage du présent arrêté. Ils se muniront de vivres pour 48 heures et de couvertures ». Il reste interné cinq jours, avant d’être expulsé vers la France le 15 mai.
Parti de Bruxelles, le convoi ferroviaire passe par le Fauga / Mazères-sur-Salat (Haute-Garonne) et Bordeaux avant de gagner le camp d’internement de St Cyprien (Pyrénées Orientales) [i]. Suite aux inondations qui dévastent les lieux début octobre 1940, il est sans doute hébergé dans un autre camp avant d’être envoyé au GTE 805 (Groupement de Travailleurs Etrangers) de la Favède, détachement de la Grand Combe dans le Gard. Le travail dans les mines de charbon y est effectué par la main-d’œuvre bon marché provenant des camps du sud.
C’est là qu’il est arrêté pour raisons raciales et convoyé à Drancy. Le 7 septembre 1942. Il est déporté à Auschwitz par le convoi 29, pour être exterminé – probablement à son arrivée – ; il a alors 35 ans. Sa mort est actée, mais la date exacte de celle-ci n’est pas connue.
Rescapée de la Shoah avec ses enfants, son épouse Gerta, s’enquiert en novembre 1945 de savoir ce qu’est devenu son mari, auprès du bureau de l’UNRRA [ii] à Francfort. Elle fait état du dernier message qu’elle a reçu de lui, venant de la Favède, grâce à la Croix Rouge : « Certainement évacué vers quelque part, peut être vers la mort, je vous fais mes derniers adieux ». Depuis, ajoute-t-elle « je suis restée sans nouvelle aucune ». Gerta demande de l’aide pour elle et ses deux enfants car les secours qui lui sont alloués sont insuffisants : « Il me faut avec mes deux enfants vivre avec 55 Reichsmark d’aide, et payer en plus le loyer pour un logement de secours, étant donné que le bombardement du 29 janvier 1943 à Francfort/Main a totalement détruit le 48 rue Bonheimer, de sorte que j’ai tout perdu. En sus, le fait que je suis malade m’empêche de travailler. Jusqu’à présent je n’ai bénéficié d’aucun soutien ».
Marie Balta, Gérard Krebs, Jeannette Magnin (traductions de l’allemand), Éric Bernard (recherches documentaires).
[ii] Camp de St Cyprien : en mai 1940 on compte 5 000 internés, en août 1940 : 3 168 (en raison du rapatriement des ressortissants du Reich), en octobre 1940 : 6 000 personnes. En octobre 1940, 3870 hommes sont transférés vers le camp de Gurs avant leur déportation à Auschwitz. A l’été 1940, les autorités procédèrent au transfert de quelques volontaires vers les mines de sel de Theresienstadt (Pologne).
[ii] En 1945, l’UNRRA (United Nations Relief and Rehabilitation Administration) aide au rapatriement de pluieurs millions de réfugiés et gère plusieurs centaines de camps de personnes déplacées en Allemagne, en Italie et en Autriche.
Sources :
Arolsen. Kurt, ses parents
Fiche Drancy
Archives Fédérales d’Allemagne : registre commémoratif.
Chemins de Mémoire : Camps des Pyrénées Orientales
Encyclopédie Multimédia de la Shoah : Administration des Nations Unies pour les Secours et la Réhabilitation.
https://de.wikipedia.org/wiki/Liste_der_Stolpersteine_in_Frankfurt-Nordend
Wikipédia : synagogue de Francfort/Main.
Étude des lieux d’Internement 1938-1945. FMD. La Favède, détachement de la Grand Combe.
Site MyHeritage
Ministère des Armées. Chemins de Mémoire
Marcel Bervoets « La liste de Saint Cyprien »
RECHERCHEZ
Le père de Kurt, Joseph Nordhäuser est un allemand de confession juive, né le 28 mars 1876 à Wüstensachsen à la périphérie d’Ehrenberg, dans le comté de Kassel (Hesse). Sa mère, Johana, est née Löbenstein, le 28 mars 1875 à Marköbel, près de Francfort-sur-le-Main, dans le Land de Hesse. C’est là également que naît Kurt, Levi, le 27 août 1907. Pendant l’entre-deux guerres, les Nordhäuser vivent dans l’ancien ghetto de Francfort, devenu le quartier juif, au 52 Wollgraben.
Vers la fin des années 1920, Kurt épouse Gerta Skama (ou Kama), née le 15 juin 1906 à Francfort. Ils auront deux enfants, tous deux nés dans cette ville : Edith, le 12 août 1930 et Günther le 24 mars 1936. La famille réside en dernier lieu au 48 rue Bonheimer.
En 1939, Gerta figure sur les listes de recensement des minorités en Allemagne. On sait par ailleurs que son mari Kurt se réfugie en Belgique à peu près à cette époque. Est-il parti seul pour préparer la venue de sa famille ou parents et enfants sont-ils partis ensemble dans le courant de l’année 1939, la question reste entière.
Toujours est-t-il que Kurt, domicilié au 29 rue verte à Bruxelles est, comme plusieurs milliers d’autres personnes, incarcéré par les autorités belges le 10 mai 1940, suite à un arrêté ministériel publié le jour même, stipulant : « Les étrangers de sexe masculin nés entre le 1er janvier 1881 et le 31 décembre 1923, […] ressortissants ennemis, sont tenus de se présenter à la maison communale de leur résidence […] dans un délai de deux heures à compter de l’affichage du présent arrêté. Ils se muniront de vivres pour 48 heures et de couvertures ». Il reste interné cinq jours, avant d’être expulsé vers la France le 15 mai.
Parti de Bruxelles, le convoi ferroviaire passe par le Fauga / Mazères-sur-Salat (Haute-Garonne) et Bordeaux avant de gagner le camp d’internement de St Cyprien (Pyrénées Orientales) [i]. Suite aux inondations qui dévastent les lieux début octobre 1940, il est sans doute hébergé dans un autre camp avant d’être envoyé au GTE 805 (Groupement de Travailleurs Etrangers) de la Favède, détachement de la Grand Combe dans le Gard. Le travail dans les mines de charbon y est effectué par la main-d’œuvre bon marché provenant des camps du sud.
C’est là qu’il est arrêté pour raisons raciales et convoyé à Drancy. Le 7 septembre 1942. Il est déporté à Auschwitz par le convoi 29, pour être exterminé – probablement à son arrivée – ; il a alors 35 ans. Sa mort est actée, mais la date exacte de celle-ci n’est pas connue.
Rescapée de la Shoah avec ses enfants, son épouse Gerta, s’enquiert en novembre 1945 de savoir ce qu’est devenu son mari, auprès du bureau de l’UNRRA [ii] à Francfort. Elle fait état du dernier message qu’elle a reçu de lui, venant de la Favède, grâce à la Croix Rouge : « Certainement évacué vers quelque part, peut être vers la mort, je vous fais mes derniers adieux ». Depuis, ajoute-t-elle « je suis restée sans nouvelle aucune ». Gerta demande de l’aide pour elle et ses deux enfants car les secours qui lui sont alloués sont insuffisants : « Il me faut avec mes deux enfants vivre avec 55 Reichsmark d’aide, et payer en plus le loyer pour un logement de secours, étant donné que le bombardement du 29 janvier 1943 à Francfort/Main a totalement détruit le 48 rue Bonheimer, de sorte que j’ai tout perdu. En sus, le fait que je suis malade m’empêche de travailler. Jusqu’à présent je n’ai bénéficié d’aucun soutien ».
Marie Balta, Gérard Krebs, Jeannette Magnin (traductions de l’allemand), Éric Bernard (recherches documentaires).
[ii] Camp de St Cyprien : en mai 1940 on compte 5 000 internés, en août 1940 : 3 168 (en raison du rapatriement des ressortissants du Reich), en octobre 1940 : 6 000 personnes. En octobre 1940, 3870 hommes sont transférés vers le camp de Gurs avant leur déportation à Auschwitz. A l’été 1940, les autorités procédèrent au transfert de quelques volontaires vers les mines de sel de Theresienstadt (Pologne).
[ii] En 1945, l’UNRRA (United Nations Relief and Rehabilitation Administration) aide au rapatriement de pluieurs millions de réfugiés et gère plusieurs centaines de camps de personnes déplacées en Allemagne, en Italie et en Autriche.
Sources :
Arolsen. Kurt, ses parents
Fiche Drancy
Archives Fédérales d’Allemagne : registre commémoratif.
Chemins de Mémoire : Camps des Pyrénées Orientales
Encyclopédie Multimédia de la Shoah : Administration des Nations Unies pour les Secours et la Réhabilitation.
https://de.wikipedia.org/wiki/Liste_der_Stolpersteine_in_Frankfurt-Nordend
Wikipédia : synagogue de Francfort/Main.
Étude des lieux d’Internement 1938-1945. FMD. La Favède, détachement de la Grand Combe.
Site MyHeritage
Ministère des Armées. Chemins de Mémoire
Marcel Bervoets « La liste de Saint Cyprien »