HENENBERG Henri

  • Auschwitz

  • Né le 26 janvier 1922 à Berlin

  • Décédé à Auschwitz en décembre 1943

Max Henenberg et son épouse Dora vivent à Berlin. Ils ont un premier fils, Dolph, puis un second, Henri (Chuny), le 26 janvier 1922. Quelques années plus tard, la famille émigre en Belgique où naît un dernier garçon : Sylver, le 15 janvier 1929 à Anderlecht (Bruxelles). Juste avant-guerre, ils habitent Anvers, ce qui permet à Henri d’apprendre le métier de tailleur de diamants.

En 1939, les Henenberg accueillent des proches parents qui fuient les persécutions nazies à Berlin : Czarna Sprung et ses deux garçons : Joseph, né en 1927, et Heini. Au moment de l’offensive allemande, comme de nombreux Belges, les Henenberg décident de se réfugier en France. Ils partent avec leurs deux plus jeunes enfants : Henri et Sylver ; Joseph les accompagne seul car sa mère veut rester auprès d’Heini, hospitalisé. A Arras, le petit groupe arrive à prendre un train vers le sud. Malheureusement, celui-ci est victime d’une terrible collision[i] . Dora Henenberg y perd ses deux jambes, la gangrène s’installe, elle meurt trois jours plus tard. Son mari doit également être amputé d’une jambe. Il rentre probablement ensuite en Belgique avec Henri et Sylver.

La famille s’établit alors semble-t-il à Bruxelles, 15 rue Joseph Claes. Malgré une situation qui devient chaque jour plus difficile pour les juifs, Max renonce à se réfugier de nouveau en France avec ses deux plus jeunes enfants. Mais son aîné, Dolph se lance dans l’aventure en août 1942 avec son cousin Joseph Sprung, tous deux munis de faux papiers.

Ceux-ci passent d’abord quelques mois à Montpellier où Joseph réussit à se faire établir une carte d’identité tout à fait authentique, au nom de Joseph Dubois. Cependant, en juillet 1943, Ils sont obligés de s’enfuir à Bordeaux, pour échapper aux Allemands. Joseph y trouve du travail comme interprète dans une entreprise suisse construisant, pour l’organisation Todt, un bunker pour les sous-marins. De son côté, Dolph ne peut s’empêcher de penser à ses frères, restés en Belgique. Il finit par convaincre Joseph, le seul à pouvoir voyager sans crainte grâce à ses vrais papiers d’identité, d’aller les chercher.

Ainsi, probablement à la fin de l’été 1943, Joseph prend en charge ses deux cousins : Henri qui, tuberculeux, était dans un sanatorium et Sylver, 14 ans, qui vivait avec son père. Arrivés en France, ils s’installent dans une petite commune : Le Moutchic, au bord du lac de Lacanau (Gironde). Au mois d’octobre, les trois jeunes gens tentent de passer en Espagne, en compagnie de Dolph, près de La Llagone (Pyrénées-Orientales). Hélas, les cols sont trop enneigés, aucun passeur ne veut tenter l’aventure.

Joseph, Henri et Sylver décident alors de passer par la Suisse. Peut-être est-ce sur leur chemin qu’ils font halte quelques temps à Nîmes, où on trouve la trace des deux frères Henenberg au 3 rue de l’Hôtel de Ville. Ils choisissent comme point de passage le village de La Cure, à cheval sur la frontière, entre la commune suisse de Saint-Cergue et la commune française des Rousses (Haut-Jura). A peine passés, ils sont arrêtés par les douaniers qui les refoulent en France, en les avertissant – selon la procédure alors en vigueur – que s’ils recommencent ils les livreront aux Allemands. Les trois jeunes gens, qui n’ont quasiment plus d’argent, font une seconde tentative deux jours plus tard. Les douaniers suisses les remettent à une patrouille allemande à qui ils confient leurs faux papiers ainsi que les vrais, portant la mention « Juif ».

C’est le 15 novembre, ils sont donc arrêtés pour motif racial et internés à Besançon pendant trois semaines, puis envoyés à Drancy le 7 décembre 1943.  On leur attribue le matricule N° 9722 et le carnet de fouille 37/99 pour Henri et le matricule N° 9723 et carnet de fouille 37/98 pour Sylver.

Tous trois sont déportés par le convoi N° 63 pour Auschwitz le 17 décembre 1943. A leur arrivée à la gare, on leur indique qu’il faut marcher jusqu’au camp mais qu’un camion peut prendre en charge les malades. Henri, affaibli par sa tuberculose, monte dans le camion. Sylver le suit malgré les admonestations de Joseph : il ne veut pas abandonner son frère ! Ils sont emmenés directement à la chambre à gaz.

Joseph Sprung échappe à ce terrible sort. Sous le matricule 108217, il est affecté à Monowitz-Buna (Auschwitz III) où il est exploité comme soudeur à l’usine IG Farben jusqu’à l’évacuation du camp. En avril 1945 il parvient à échapper aux dernières « marches de la mort » en se cachant dans une grange où il est récupéré le lendemain par les troupes américaines. L’année suivante, il s’embarque pour l’Australie et s’installe à Melbourne. Il change son patronyme en Spring, se marie et a deux fils.

Rédacteurs : Georges Muller et Gérard Krebs


[i] il s’agit vraisemblablement de l’accident du 18 mai 1940 en gare de Morgny (Eure) cf. https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_accidents_ferroviaires_en_France_au_XXe_si%C3%A8cle

Sources :

Archives HD Caen (caisse 40 R 1161)
BBC News du 21 janvier 2000
Yad Vashem (photo de Henri)
Article du « Monde » du 15 août 1998 de Jean-Claude Buhrer
Archives Arolsen. Photo de Sylver et son cousin Joseph en 1943 : http://www.wollheim-memorial.de/en/joseph_spring_1927Témoignage : https://www.woz.ch/einreiseversuche-in-die-schweiz-und-die-zeit-in-auschwitz/ein-glueck-trotz-schweiz-zu-leben

Vous avez un complément d’informations ? N’hésitez pas nous le faire savoir.

HENENBERG Henri

  • Auschwitz

  • Né le 26 janvier 1922 à Berlin

  • Décédé à Auschwitz en décembre 1943

Max Henenberg et son épouse Dora vivent à Berlin. Ils ont un premier fils, Dolph, puis un second, Henri (Chuny), le 26 janvier 1922. Quelques années plus tard, la famille émigre en Belgique où naît un dernier garçon : Sylver, le 15 janvier 1929 à Anderlecht (Bruxelles). Juste avant-guerre, ils habitent Anvers, ce qui permet à Henri d’apprendre le métier de tailleur de diamants.

En 1939, les Henenberg accueillent des proches parents qui fuient les persécutions nazies à Berlin : Czarna Sprung et ses deux garçons : Joseph, né en 1927, et Heini. Au moment de l’offensive allemande, comme de nombreux Belges, les Henenberg décident de se réfugier en France. Ils partent avec leurs deux plus jeunes enfants : Henri et Sylver ; Joseph les accompagne seul car sa mère veut rester auprès d’Heini, hospitalisé. A Arras, le petit groupe arrive à prendre un train vers le sud. Malheureusement, celui-ci est victime d’une terrible collision[i] . Dora Henenberg y perd ses deux jambes, la gangrène s’installe, elle meurt trois jours plus tard. Son mari doit également être amputé d’une jambe. Il rentre probablement ensuite en Belgique avec Henri et Sylver.

La famille s’établit alors semble-t-il à Bruxelles, 15 rue Joseph Claes. Malgré une situation qui devient chaque jour plus difficile pour les juifs, Max renonce à se réfugier de nouveau en France avec ses deux plus jeunes enfants. Mais son aîné, Dolph se lance dans l’aventure en août 1942 avec son cousin Joseph Sprung, tous deux munis de faux papiers.

Ceux-ci passent d’abord quelques mois à Montpellier où Joseph réussit à se faire établir une carte d’identité tout à fait authentique, au nom de Joseph Dubois. Cependant, en juillet 1943, Ils sont obligés de s’enfuir à Bordeaux, pour échapper aux Allemands. Joseph y trouve du travail comme interprète dans une entreprise suisse construisant, pour l’organisation Todt, un bunker pour les sous-marins. De son côté, Dolph ne peut s’empêcher de penser à ses frères, restés en Belgique. Il finit par convaincre Joseph, le seul à pouvoir voyager sans crainte grâce à ses vrais papiers d’identité, d’aller les chercher.

Ainsi, probablement à la fin de l’été 1943, Joseph prend en charge ses deux cousins : Henri qui, tuberculeux, était dans un sanatorium et Sylver, 14 ans, qui vivait avec son père. Arrivés en France, ils s’installent dans une petite commune : Le Moutchic, au bord du lac de Lacanau (Gironde). Au mois d’octobre, les trois jeunes gens tentent de passer en Espagne, en compagnie de Dolph, près de La Llagone (Pyrénées-Orientales). Hélas, les cols sont trop enneigés, aucun passeur ne veut tenter l’aventure.

Joseph, Henri et Sylver décident alors de passer par la Suisse. Peut-être est-ce sur leur chemin qu’ils font halte quelques temps à Nîmes, où on trouve la trace des deux frères Henenberg au 3 rue de l’Hôtel de Ville. Ils choisissent comme point de passage le village de La Cure, à cheval sur la frontière, entre la commune suisse de Saint-Cergue et la commune française des Rousses (Haut-Jura). A peine passés, ils sont arrêtés par les douaniers qui les refoulent en France, en les avertissant – selon la procédure alors en vigueur – que s’ils recommencent ils les livreront aux Allemands. Les trois jeunes gens, qui n’ont quasiment plus d’argent, font une seconde tentative deux jours plus tard. Les douaniers suisses les remettent à une patrouille allemande à qui ils confient leurs faux papiers ainsi que les vrais, portant la mention « Juif ».

C’est le 15 novembre, ils sont donc arrêtés pour motif racial et internés à Besançon pendant trois semaines, puis envoyés à Drancy le 7 décembre 1943.  On leur attribue le matricule N° 9722 et le carnet de fouille 37/99 pour Henri et le matricule N° 9723 et carnet de fouille 37/98 pour Sylver.

Tous trois sont déportés par le convoi N° 63 pour Auschwitz le 17 décembre 1943. A leur arrivée à la gare, on leur indique qu’il faut marcher jusqu’au camp mais qu’un camion peut prendre en charge les malades. Henri, affaibli par sa tuberculose, monte dans le camion. Sylver le suit malgré les admonestations de Joseph : il ne veut pas abandonner son frère ! Ils sont emmenés directement à la chambre à gaz.

Joseph Sprung échappe à ce terrible sort. Sous le matricule 108217, il est affecté à Monowitz-Buna (Auschwitz III) où il est exploité comme soudeur à l’usine IG Farben jusqu’à l’évacuation du camp. En avril 1945 il parvient à échapper aux dernières « marches de la mort » en se cachant dans une grange où il est récupéré le lendemain par les troupes américaines. L’année suivante, il s’embarque pour l’Australie et s’installe à Melbourne. Il change son patronyme en Spring, se marie et a deux fils.

Rédacteurs : Georges Muller et Gérard Krebs


[i] il s’agit vraisemblablement de l’accident du 18 mai 1940 en gare de Morgny (Eure) cf. https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_accidents_ferroviaires_en_France_au_XXe_si%C3%A8cle

Sources :

Archives HD Caen (caisse 40 R 1161)
BBC News du 21 janvier 2000
Yad Vashem (photo de Henri)
Article du « Monde » du 15 août 1998 de Jean-Claude Buhrer
Archives Arolsen. Photo de Sylver et son cousin Joseph en 1943 : http://www.wollheim-memorial.de/en/joseph_spring_1927Témoignage : https://www.woz.ch/einreiseversuche-in-die-schweiz-und-die-zeit-in-auschwitz/ein-glueck-trotz-schweiz-zu-leben

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