RECHERCHEZ
Maurice Moïse BENATTAR appartient à une famille de commerçants français juifs, installés à Nîmes depuis 1900.
Son père, Israël, né en 1872 à Tunis et sa mère, Rébecca SIBONI, née le 16 juillet 1876 à Jérusalem, se sont rencontrés à Marseille et s’y sont mariés le 29 janvier 1896. Ils ont eu 9 enfants, trois nés à Marseille et six à Nîmes et ont reçu pour cela en 1923 la médaille d’argent de la famille française. Maurice est le cinquième. Il fait une partie de sa scolarité au Lycée de garçons de Nîmes, aujourd’hui Lycée Alphonse Daudet. Puis, il exerce plusieurs métiers dans le commerce avant de s’associer avec son père et deux frères cadets pour fonder le 1er janvier 1936 une société qui exploite trois magasins. Il gère personnellement celui de Nîmes « Au Mouton à 5 Pattes », qui vend des chaussures au 4 rue des Halles.
Il fait la campagne de 1939-1940 comme maréchal-des logis dans l’Artillerie coloniale. Il est fait prisonnier le 25 juin 1940 à Saint-Dié et envoyé dans un stalag en Allemagne. Il s’en évade le 27 juin 1941 et revient à Nîmes. Maurice est un bon Français respectueux des lois. En 1941, il se fait recenser. Puis, en 1942, il fera apposer la mention « Juif » sur sa carte d’identité. Enfin en mai 1943, quand il quittera Nîmes pour la Savoie, il déclarera en préfecture son nouveau domicile.
Fin 1941, il rencontre sa future femme, Erna ZAGORSKI. Erna et ses parents, Abraham et Sara, sont des juifs polonais qui ont quitté en 1940 Strasbourg, où ils habitaient depuis 1910, pour se réfugier en zone libre. Ils sont arrivés à Nîmes le 18 novembre 1941. Maurice et Erna se marient le 12 mai 1942 à Nîmes. Ils habitent dans un appartement, 30 rue Pradier à Nîmes. En 1942, les trois magasins de la société familiale sont pourvus d’un administrateur provisoire. Le 27 janvier 1943, un fils, Guy, naît à Nîmes.
Avec Erna, Guy et ses beaux-parents, Maurice s’installe le 15 mai 1943 à la Motte-Servolex, en Savoie, dans la zone occupée par l’Italie. Quand, le 8 septembre 1943, les Allemands occupent cette zone, toute la famille s’installe en Isère, à Allevard-les-Bains.
Le 24 janvier 1944, alors qu’il dîne avec Erna au restaurant du Nouvel Hôtel, la Gestapo y rafle plus de 12 personnes qui sont internées à Grenoble, puis transférées à Drancy le 27 janvier. Erna, enceinte de 8 mois, n’est pas raflée. Le 31 janvier, depuis Drancy, Maurice envoie à sa femme un courrier rassurant. Il lui recommande de retourner à la Motte-Servolex, chez un certain M. Duc.
Le 3 février, Maurice part pour Auschwitz dans le convoi 67.
Le 1er mars, un certain Jean Josserand envoie une carte à M. Duc, donnant des nouvelles rassurantes de Maurice, qui souhaite avoir des nouvelles et un colis. Cette carte vient du camp annexe de Lagischa, dépendant d’Auschwitz, où se construit une centrale électrique.
Le 9 mars, un fils, Jacques, naît à Chambéry, près de la Motte-Servolex. Le 21 mars, Erna, par l’intermédiaire de M. Duc, répond : « Erna, Guy et Jacques, sont bien rentrés à la maison avec les grands-parents, ont trouvé toute la famille en bonne santé ». Le 6 mai, Jean Josserand envoie une nouvelle carte. Il a reçu celle de M. Duc et le colis. Il a vu Maurice, qui a dû s’arrêter de travailler parce qu’il était blessé à son pied. Le 22 juin, nouvelle carte de Jean Josserand, qui vient de recevoir un courrier du 24 mai. Il annonce que Maurice a quitté ce camp pour un autre camp quelques jours auparavant. Le 2 juillet, dernière carte de Jean Josserand, qui a eu la surprise de rencontrer le 28 juin Maurice, qui « sortait de l’hôpital, ayant été fatigué ».
Erna ne recevra pas d’autres nouvelles avant 1945. Raymond Lévy, rescapé d’Auschwitz, lui écrira le 18 juillet 1945. Il a quitté Maurice peu après le 15 août 1944, alors qu’ils étaient encore au camp de Lagischa. Maurice avait eu une pleurésie fin juillet qui l’avait affaibli et amaigri, mais mi-août son état n’inspirait plus d’inquiétude. Son moral était bon et il avait des projets d’avenir. On sait que les détenus de Lagischa furent transférés en septembre vers Neu-Dachs ou Auschwitz I.
Par jugement déclaratif de décès du Tribunal Civil de Nîmes du 7 octobre 1946, Maurice sera déclaré décédé « avant fin janvier 1945 à Auschwitz ». Le statut de « mort en déportation » lui sera donné par arrêté du 4 septembre 2007.
Emplacement sur le mur du Mémorial de la Shoah : dalle n° 3, colonne n° 1, rangée n° 3
Rédaction: Camille Tardieu, Maël Le Bourhis et Léane Maupoux. Elèves de terminale du Lycée Daudet de Nîmes, 2022-2023. Professeures encadrant le projet 12 Vies : Agnès Arcin et Anne Brugère
Sources :
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Maurice Moïse BENATTAR appartient à une famille de commerçants français juifs, installés à Nîmes depuis 1900.
Son père, Israël, né en 1872 à Tunis et sa mère, Rébecca SIBONI, née le 16 juillet 1876 à Jérusalem, se sont rencontrés à Marseille et s’y sont mariés le 29 janvier 1896. Ils ont eu 9 enfants, trois nés à Marseille et six à Nîmes et ont reçu pour cela en 1923 la médaille d’argent de la famille française. Maurice est le cinquième. Il fait une partie de sa scolarité au Lycée de garçons de Nîmes, aujourd’hui Lycée Alphonse Daudet. Puis, il exerce plusieurs métiers dans le commerce avant de s’associer avec son père et deux frères cadets pour fonder le 1er janvier 1936 une société qui exploite trois magasins. Il gère personnellement celui de Nîmes « Au Mouton à 5 Pattes », qui vend des chaussures au 4 rue des Halles.
Il fait la campagne de 1939-1940 comme maréchal-des logis dans l’Artillerie coloniale. Il est fait prisonnier le 25 juin 1940 à Saint-Dié et envoyé dans un stalag en Allemagne. Il s’en évade le 27 juin 1941 et revient à Nîmes. Maurice est un bon Français respectueux des lois. En 1941, il se fait recenser. Puis, en 1942, il fera apposer la mention « Juif » sur sa carte d’identité. Enfin en mai 1943, quand il quittera Nîmes pour la Savoie, il déclarera en préfecture son nouveau domicile.
Fin 1941, il rencontre sa future femme, Erna ZAGORSKI. Erna et ses parents, Abraham et Sara, sont des juifs polonais qui ont quitté en 1940 Strasbourg, où ils habitaient depuis 1910, pour se réfugier en zone libre. Ils sont arrivés à Nîmes le 18 novembre 1941. Maurice et Erna se marient le 12 mai 1942 à Nîmes. Ils habitent dans un appartement, 30 rue Pradier à Nîmes. En 1942, les trois magasins de la société familiale sont pourvus d’un administrateur provisoire. Le 27 janvier 1943, un fils, Guy, naît à Nîmes.
Avec Erna, Guy et ses beaux-parents, Maurice s’installe le 15 mai 1943 à la Motte-Servolex, en Savoie, dans la zone occupée par l’Italie. Quand, le 8 septembre 1943, les Allemands occupent cette zone, toute la famille s’installe en Isère, à Allevard-les-Bains.
Le 24 janvier 1944, alors qu’il dîne avec Erna au restaurant du Nouvel Hôtel, la Gestapo y rafle plus de 12 personnes qui sont internées à Grenoble, puis transférées à Drancy le 27 janvier. Erna, enceinte de 8 mois, n’est pas raflée. Le 31 janvier, depuis Drancy, Maurice envoie à sa femme un courrier rassurant. Il lui recommande de retourner à la Motte-Servolex, chez un certain M. Duc.
Le 3 février, Maurice part pour Auschwitz dans le convoi 67.
Le 1er mars, un certain Jean Josserand envoie une carte à M. Duc, donnant des nouvelles rassurantes de Maurice, qui souhaite avoir des nouvelles et un colis. Cette carte vient du camp annexe de Lagischa, dépendant d’Auschwitz, où se construit une centrale électrique.
Le 9 mars, un fils, Jacques, naît à Chambéry, près de la Motte-Servolex. Le 21 mars, Erna, par l’intermédiaire de M. Duc, répond : « Erna, Guy et Jacques, sont bien rentrés à la maison avec les grands-parents, ont trouvé toute la famille en bonne santé ». Le 6 mai, Jean Josserand envoie une nouvelle carte. Il a reçu celle de M. Duc et le colis. Il a vu Maurice, qui a dû s’arrêter de travailler parce qu’il était blessé à son pied. Le 22 juin, nouvelle carte de Jean Josserand, qui vient de recevoir un courrier du 24 mai. Il annonce que Maurice a quitté ce camp pour un autre camp quelques jours auparavant. Le 2 juillet, dernière carte de Jean Josserand, qui a eu la surprise de rencontrer le 28 juin Maurice, qui « sortait de l’hôpital, ayant été fatigué ».
Erna ne recevra pas d’autres nouvelles avant 1945. Raymond Lévy, rescapé d’Auschwitz, lui écrira le 18 juillet 1945. Il a quitté Maurice peu après le 15 août 1944, alors qu’ils étaient encore au camp de Lagischa. Maurice avait eu une pleurésie fin juillet qui l’avait affaibli et amaigri, mais mi-août son état n’inspirait plus d’inquiétude. Son moral était bon et il avait des projets d’avenir. On sait que les détenus de Lagischa furent transférés en septembre vers Neu-Dachs ou Auschwitz I.
Par jugement déclaratif de décès du Tribunal Civil de Nîmes du 7 octobre 1946, Maurice sera déclaré décédé « avant fin janvier 1945 à Auschwitz ». Le statut de « mort en déportation » lui sera donné par arrêté du 4 septembre 2007.
Emplacement sur le mur du Mémorial de la Shoah : dalle n° 3, colonne n° 1, rangée n° 3
Rédaction: Camille Tardieu, Maël Le Bourhis et Léane Maupoux. Elèves de terminale du Lycée Daudet de Nîmes, 2022-2023. Professeures encadrant le projet 12 Vies : Agnès Arcin et Anne Brugère
Sources :